le 7 décembre 2003

Testenni Gaël Roblin diwar-benn an abadenn vezhus en deus bet da c'houzanv da geñver obidoù e dad

Témoignage de Gaël Roblin détaillant la cérémonie grotesque qu'il a dû endurer lors des obsèques de son père

Da skignañ diwar e c'houlenn / à diffuser à sa demande

« Contrairement à ce qui a été écrit ici ou là, je n'ai pu assister à la cérémonie civile suite au décès de mon père, pas plus qu'à l'incinération. J'accuse l'état français de s'être livré à une sordide mise en scène à cette occasion à des fins de propagande.

Voilà ce qui s'est réellement passé.

Vendredi 21 novembre j'ai été informé par mon avocat du décès de mon père. Le jour même il a fait une demande à la chambre d'instruction afin que je puisse assister aux funérailles. J'ai été informé lundi 24 novembre de la décision positive de la chambre. Mardi 25 au départ de La Santé je me suis rendu en fourgon cellulaire à Saint Brieuc. L'escorte était forte numériquement, bien plus que pour un jugement où je m'étais rendu avec un autre prisonnier politique breton en 2002 à Nantes.

Arrivé à 16h30 à la gendarmerie de St Brieuc après 400 km menotté, j'ai été placé dans une cellule d'une saleté repoussante, ignoble et glaciale. Les cellules du palais de justice de Paris sont d'une propreté comparables aux toilettes du roi d'Espagne si on compare le palais de justice de Paris avec la gendarmerie de St Brieuc. Les connaisseurs apprécieront.

Vers 17h j'ai été emmené dans un cortège de sirènes hurlantes et de gyrophares au crématorium. On avait imposé l'itinéraire du funérarium de Lanvollon à St Brieuc à ma famille, tout en insistant sur la nécessité d'une présence minimum au crématorium.

Arrivé là on a refusé que mon oncle (qui pourtant dispose d'un permis lui permettant de me rendre visite à La Santé) puisse venir me saluer, on a refusé sèchement que j'embrasse la compagne de mon père.

Aucune condition de sécurité ne justifie que l'on me refuse ce droit élémentaire à assurer mes proches d'un minimum de gestes de compassion en ces circonstances pénibles. C'est là un geste d'une incroyable sauvagerie morale faite à mon endroit, mais aussi à ma famille en deuil qui est restée sidérée par le vacarme assourdissant et le déploiement militaire indécent autour du crématorium. D'autant qu'elle avait déjà dû enduré les filatures et relevés de plaques d'immatriculation entre le domicile de mon père, le funérarium de Lanvollon, et la salle polyvalente de Pléguien où lui a été rendu hommage.

Je me suis donc retrouvé dans un petite salle du crématorium de St Brieuc entouré de quatre militaires français robocopisés dont deux étaient armés, seul et toujours menotté alors que ma famille se trouvait à quelques mètres. Comprenant alors que j'aurais seulement le droit de me recueillir dans ces conditions délirantes, j'ai décidé de mettre fin à cette mascarade indécente. Contrairement à ce qui a été écrit je n'ai pas eu le droit d'assister à la crémation et je suis rentré dans les mêmes conditions sur Paris.

Le risque de fuite était nul, car ce que se gardent bien de rapporter certains c'est que je suis détenu contre l'avis du parquet anti-terroriste et que celui-ci a demandé à trois repises ma mise en liberté considérant que j'avais de très nombreuses garanties de représentations. Je suis maintenu en détention sur la base des allégations du juge d'instruction et de la chambre d'instruction, qui se gardent bien de détailler ma prétendue participation à la réalisation d'actions clandestines, tout en se gardant d'arguer de ma qualité de porte-parole d'Emgann, mouvement toujours légal à ce jour.

Ce déploiement de force n'était justifié que pour faire croire à ma prétendue dangerosité, alors que de plus en plus de gens en Bretagne se posent des questions sur la répression féroce que subissent militants culturels et politiques bretons, et bien sûr par a proximité notoire qu'entretenait mon père jusqu'à son dernier souffle avec ceux et celles qui défendent les prisonniers politiques bretons et les droits du peuple breton.

Tout ceci prouve s'il en était encore besoin l'incroyable indécence d'un état qui n'a même pas le respect des morts et se livre en toutes circonstance à d'infâmes campagnes de criminalisation pour justifer la répression.

J'invite chacun à faire connaître son sentiment aux autorités françaises. J'ai décidé de rendre tous ces faits publics afin que chacun puisse décider en sa conscience si ma présence aux obsèques de mon père aurait créé plus de « troubles à l'ordre public » que la remise en liberté de monsieur Papon, ou la dernière opération spectacle de la Direction Nationale Anti-Terroriste dans la région de Guingamp. »